D’où nait l’intolérance ?

 

La guerre entre religions est basée sur une lecture linéaire du temps.

 

Jésus était juif. Les chrétiens ont d’ailleurs intégré l’Ancien Testament – qui est une partie de la torah juive – dans la Bible, pour dire qu’ils honorent le même Dieu qu’Abraham. Mais les juifs proclamaient être le peuple élu. Il ne faut d’ailleurs pas leur jeter la pierre: si ce qualificatif de peuple élu est dans l’Ancien Testament – un livre écrit par des hommes – il était facile de croire qu’un peuple auquel Dieu s’est adressé était l’unique élu.

 

Dieu s’est adressé aux juifs avant de parler aux premiers chrétiens. Ces derniers en ont conclu que, comme ils avaient reçu des messages divins nouveaux, leur religion naissante faisait d’eux les nouveaux prophètes. D’après les catholiques, Jésus serait même l’incarnation de Dieu sur Terre. Ça clôt le débat. 

 

Puis vint Mahomet, qui n’a pas non plus rejeté les prophètes des deux autres religions : Jésus est considéré comme un grand prophète et Marie comme une âme spirituelle élevée. Malheureusement, l’islam s’est trompé à son tour en proclamant qu’étant les derniers à avoir reçu des directives de Dieu, ils étaient les nouveaux élus.

 

Cette façon de penser reviendrait à dire que Dieu fait des sortes de mises à jour, se décrivant de telle nouvelle manière, se corrigeant et améliorant sa copie. Dire que les musulmans détiennent la dernière version (la version finale, disent-ils) du message divin est une erreur. J’ai moi-même suivi pendant trois ans et demi les enseignements d’un courant mystique d’origine indienne qui reçoit aujourd’hui encore des messages de Dieu (par canalisation des messages) et devinez quoi ? Eux aussi se croient les élus de Dieu, parce qu’ils reçoivent au XXIème siècle les messages de Dieu en temps réel. Et comme les autres courants religieux avant eux, ils pensent que les autres se fourvoient.

 

Combien d’autres religions tombées dans l’oubli ont déclaré être les seules légitimes ?

 

 

Une lecture linéaire du temps :

 

Il existe d’autres mouvements qui disent recevoir ce type de messages à travers le monde.

 

Dans mon conte philosophique « la Cité de la Tolérance », je partage l’idée que les messages divins sont délivrés à un groupe de personnes en fonction de leur culture et d’un contexte historique particulier. Dieu ferait donc des ajustements qui concernent tel ou tel groupe particulier, mais pas forcément destinés au monde entier.

 

 

Une religion syncrétique: la croyance bahaïe

 

Les bahaïs’ disent que Dieu exprime sa volonté à travers une série de messagers divins appelés Manifestations de Dieu (maẓhar-i ilāhī) ou parfois Divins Educateurs. Chaque “Manifestation” amène une révélation plus large et plus avancée, adaptée au temps et à l’époque à laquelle elle est exprimée. Par contre, les enseignements sociaux spécifiques à une religion (par ex. la direction de la prière, ou les restrictions alimentaires) peuvent être révoqués par des Manifestations ultérieures afin qu’une règle plus appropriée au temps et au lieu soit établie.

 

Cette notion de révélations religieuses progressives fait accepter aux Bahaïs la validité de la plupart des religions du monde, leurs fondateurs ou figures centrales étant considérées comme des manifestations de Dieu. Ces manifestations sont, par exemple : Moïse, Jésus, Muḥammad, Krishna, Zoroastre et Bouddha. Les bahaïs’is pensent aussi que les autres personnages religieux, comme Adam, Abraham, Noé et Houd ont réellement existé et sont des prophètes.

 

En exprimant les intentions de Dieu, ces « Manifestations » servent à établir la Religion dans le monde.

 

L’une des conclusions de mon conte philosophique “la Cité de la Tolérance” est que Dieu a souvent parlé, qu’il parle encore et parlera en de nouveaux endroits du monde dans le futur.

 

Un lecteur m’a posé cette question : “On me demande d’être tolérant vis-à-vis des croyants d’autres religions, mais ceux-ci ne le sont pas envers la mienne. Ils rejettent le vivre-ensemble. Pourquoi devrais-je faire un effort envers eux ? “

Je ne dis pas qu’il faille aimer les haineux, mais qu’il est primordial de ne pas rejeter les autres croyants à cause de ces brebis égarées.

Pourquoi avez-vous lu mon livre ? Parce que vous avez vibré en lisant le mot : tolérance. Parce que vous voulez plus de paix et que ce monde a besoin de fraternité. Parce qu’il ne peut y avoir de fraternité sans ouverture et acceptation de l’autre avec ses différences. Que la peur mène au rejet et que le rejet pousse le plus modéré parmi ceux qui en sont victimes à se défendre et à nous renvoyer notre propre intolérance. Il s’agit d’une prophétie auto-réalisatrice. Or, seul la rencontre avec la culture de l’autre et la réalisation de ce qui nous uni plutôt que de ce qui nous divise peut apaiser nos peurs.     

Si tu es croyant, alors tu pressens qu’il y a une suite après la mort. Qu’on espère aller au paradis ou avoir une bonne réincarnation, on sait bien que la colère et la violence sont des poisons pour soi-même. Et qui boirait volontairement du poison ?

 Vous êtes tous de bons chrétiens, musulmans, hindous… en ce que vous suivez les rites, les cérémonies, les usages de votre religion. Ce que je vous propose, c’est de passer à l’étape suivante : passer de bon élève à maître. Un maître est responsable de ce qu’il fait et de ce qu’il pense, et ne se soucie pas de ce que pensent les autres. Il ne regarde pas ce que font les haineux autour de lui, car il sait que son expérience de vie sur Terre est courte et qu’en peu de temps il doit devenir (ou rester) la meilleure version de lui-même. Vous voulez progresser dans l’amour du soi et dans la paix avec les autres, pour redevenir le diamant que vous êtes déjà en tant qu’âme incarnée. Alors posez-vous la question à vous-mêmes: doit-on rejeter les autres et se séparer de la richesse qu’ils apportent au monde à cause de quelques fanatiques ? Restez au-delà des événements de ce monde. C’est en pratiquant la tolérance que vous changerez le monde.

Comme le disait le rabbin Delphine Horvilleur dans l’émission Boomerang, France Inter, le 24.06.2019 : « Je suis juive, mais pas que. Je suis une mère, j’ai étudié la médecine, j’ai travaillé dans des kibboutz avec des idéaux d’entraide et de coopération, je suis écrivaine. » Un être humain a plusieurs facettes. La religion n’en est qu’une. Cette part acquise et non innée fait partie de notre vie mais ne suffit pas à décrire une personne qui pense, aime, aide, rit et pleure. Il faut redonner à la religion sa vraie place culturelle et cultuelle accompagnant notre vie sans faire du croyant d’une religion un être étrangement différent.

Louis de Bonald a dit : Un homme peut n’être pas l’ « égal » d’un autre homme, mais il est toujours son semblable. 

 

5/ Doit-on tout tolérer ?

C’est une vaste question que je laisserai volontier aux philosophes. Ma réponse sera donc concise :

   1) Non, tout ne peut pas être toléré.

   2) Tant que les actions d’une communauté ne troublent pas l’ordre public, que ces communautés ne font pas de prosélytisme et qu’elles respectent la laïcité – en tant que liberté de pensée, de croyance et de religion -,  qu’elles promeuvent des valeurs de fraternité et de bienveillance, plutôt que l’isolement et le rejet de l’autre, et qu’elles ne portent en aucune façon préjudice à leurs membres et à ceux des autres communautés, alors toutes les religions, philosophies et croyances ont le droit de s’affirmer dans leur vérité.

  3) Toute action qui, dans le cadre religieux, vise à soumettre l’autre à ses croyances va contre la laïcité chère à la France. 

 

4) Toute action menée dans le but de nuire à un autre citoyen est condamnable par la loi.